RENTREE PASTORALE 2014 – 2015 ADRESSE AUX LAICS Paroisse Sainte Famille de la Riviera II Samedi 11octobre 2014

INTRODUCTION

Chers frères, chères sœurs

Vous imaginez surement la joie qui m’anime en ce jour où je me retrouve avec vous tous, après ce long temps d’absence…de convalescence.

« O qu’il est bon, qu’il est doux pour des frères d’être ensemble et d’être unis ». La rentrée pastorale dans un diocèse est un acte de foi collectif. On éprouve de la joie à se retrouver et à regarder ensemble les réalités de notre vivre ensemble. Car malgré nos différences, le Seigneur, Maître  de la moisson nous envoie tous à la même vigne.

 

Je voudrais tout au début de notre rencontre, vous saluer fraternellement, vous venez, pour la plupart, des vacances : plaise à Dieu que vous vous soyez donnés un repos bien mérité et suffisant pour reprendre les activités professionnelles, religieuses ou scolaires.

L’Année Pastorale 2013-2014 a été pour nous une année riche en évènements tant douloureux que joyeux. Au titre des évènements douloureux, nous notons au niveau du presbyterium, le rappel à Dieu de son Eminence Bernard Cardinal AGRE, de l’Abbé Blaise ANOH, et de parents de bon nombre de frères et sœurs.

Pour les deux premiers cités, encore une fois YAKO à nous tous et merci à vous pour la mobilisation et le bon déroulement des obsèques.

En votre nom, au nom de notre presbyterium, je voudrais présenter nos sincères condoléances aux frères et aux sœurs qui ont perdus leurs parents. Chers frères, chères sœurs, soyez assurés de notre proximité dans votre deuil qui est aussi le nôtre. Puisse Dieu être votre consolation et réconfort et accueillir dans sa félicité tous nos parents.

Au titre des évènements joyeux. Nous notons en plus des joies retirées de notre pastorale, la création de votre serviteur comme Cardinal de la Sainte Eglise Catholique. Ce fut un moment intense de communion, de fraternité et de joie. J’ai été très sensible au soutien de tous et de chacun. J’ai reçu vos messages et vos cadeaux qui m’ont vraiment fait chaud au cœur. Puissiez vous recevoir, ici et maintenant, l’expression de ma gratitude aimante et fraternelle. Au moment opportun ensemble avec le peuple de Dieu je dirai une messe d’action de grâce.

Je voudrais terminer cette introduction en vous rassurant que je me porte bien. La santé est parfaite grâce à vos prières, malgré la démarche un peu dandinante. Un grand merci aux Vicaires généraux et Episcopaux et aux membres de la Curie qui, pendant ma convalescence ont assurés les affaires courantes et mis tout en œuvre pour que l’année 2013-2014 s’achève dans de bonnes conditions. J’ai pu me rendre compte, non seulement, de la maturité pastorale des agents pastoraux que vous êtes, mais aussi de la vitalité de notre presbyterium. Merci à tous et à chacun et ensemble pour un nouveau bail.    

       

LE  THEME DE L’ANNEE

 

Cette année, j’ai décidé de reconduire le thème de l’année passée : « Que la foi soit visible dans notre vie personnelle et en Eglise ». Cette reconduction répond à deux  besoins essentiels.

 

1° C’est un thème très dense qui peut encore être exploité, je sais que vous l’avez beaucoup exploité tout au long de l’année dernière. Toutefois, je mesure la nécessité  d’aller plus  en profondeur dans son application au quotidien, plus particulièrement dans nos différentes cellules familiales ; en lien avec le synode des évêques qui se tient en ce moment même à Rome sur la famille. En outre, au-delà de la famille naturelle ou nucléaire, il nous appartient de jeter un regard sur toutes les autres familles que nous constituons :

 

En Côte d'Ivoire, chrétiens et non chrétiens, nous formons une famille.

- une famille avec différents groupes linguistiques

- une famille avec diverses sensibilités religieuses

- une famille avec différents partis politiques.

 

Mais cette famille pour nous les chrétiens se déclinent sous d'autres formes qui n'excluent pas les premières citées, bien plus qui se retrouve à l'intérieur de ces cas cités plus haut et qui peut se décliner comme suit:

- famille paroissiale qui va révéler les relations entre prêtres eux-mêmes  (équipes presbytérales) et entre prêtres et laïcs.

- famille diocésaine qui peut être vue aussi en doyennés et en vicariats.

- famille religieuse vécue avec les différentes congrégations,  instituts et Communautés nouvelles, dans leur diversité.

- famille ecclésiale de base qui va approfondir les relations entre les fidèles vivant  dans le même quartier.

 

2° La seconde raison pour laquelle j’ai souhaité reconduire, c’est la tenue prochaine des élections qui se dérouleront dans l' année-2015. Point n’est besoin de rappeler les événements douloureux que le pays a connu aux lendemains des élections de 2010 : des familles ont été divisés, écartelées, des communautés sacerdotales ont été brisées, certaines CEB ont volé en éclats,… la liste est encore longue. Notre foi à été mise à rude contribution au point qu'il nous était difficile de distinguer notre gauche de notre droite certains même sont allés jusqu’à bruler leur bible… . (Spectacle désolant offert par les chrétiens).

 

Nous sommes interpelés à approfondir le thème de l’année pour nous aider à parvenir à vivre ensemble sans que les heurts inhérents à toute vie en société ne se transforment en drame et que le pays se déchire comme nous l'avons connu?

 

Orienter le thème de l’année sur le socle qu'est la famille, nous aidera tous à réfléchir sur la qualité de notre vie fraternelle. Si nous sommes membre d’une même famille, comment sommes-nous frères ensemble ? Comment œuvrons-nous pour protéger l’harmonie de cette famille ?

 

Chers frères, chères sœurs,

 

Comme levain dans la pâte humaine, nous nous devons d’être actifs et présents  dans la société.

 

 La vie du chrétien au sein de la société est un témoignage. Qu’attendons-nous du chrétien catholique d’aujourd’hui face à une situation complexe dans la société ?   Il doit être présent dans ce qui existe pour le transformer progressivement selon l’esprit de l’Evangile qui est amour et vérité.

 

Il ne lui convient plus de se ranger automatiquement du côté de la majorité sans réflexion préalable. Son attitude comme son action doivent refléter une maturité d’esprit qui n’intervient pas au hasard (Cf. le chrétien face à la politique). C’est donc une invitation à aller plus en profondeur dans l’optique d’une foi plus visible  dans notre vie personnelle et dans nos communautés.  Mais aussi une invitation à prendre conscience des implications de notre foi dans la vie de tous les jours, surtout au niveau social et politique en cette année électorale. Le faisant, nous manifesterons à la lumière de notre foi notre appartenance effective à notre pays et notre volonté de nous affirmer comme hommes et femmes responsables.

 

 Il est important que nous sachions que les Fidèles Laïcs du Christ que nous sommes, parce que établis par Dieu, au nom de notre baptême, nous devons exercer notre sacerdoce baptismal dans toute sa plénitude comme témoins de Jésus Christ et de son Evangile dans ce monde, en le transformant du dedans, par l’infusion de l’esprit évangélique vécue, confessé et professé. La transformation du monde dans toutes ses activités humaines est donc pour nous un impératif, un devoir, une mission.

 

Voici ce qu’affirme le deuxième Concile de Vatican en sa constitution dogmatique sur l’Eglise : « A tous les laïcs, incombe la noble charge de travailler à ce que le dessein divin de salut parvienne de plus en plus à tous les hommes de tous les temps et de toute la terre. » Cf. LG 33.

 

 C’est dire que nous les chrétiens catholiques, nous devons prendre la place qui est la nôtre dans l’Eglise et dans le monde, et contribuer ainsi à son développement car, les défis qui se présentent de plus en plus à nos citoyens, sont multiples et de tous ordres et, la seule action des pasteurs ne saurait satisfaire tous les cris de détresse qui leur sont adressés.

 

Cela passe par l’engagement des chrétiens catholiques que vous êtes, dans la vie politique, économique et sociale de notre pays. La Côte d’Ivoire nouvelle que nous appelons de tous nos vœux, doit se construire avec toutes les forces qui la composent. Nul n’a le droit, de se mettre en retrait de ce que notre  pays va vivre cette année. La participation à la vie communautaire n’est pas seulement une des plus grandes aspirations du citoyen appelé à exercer librement et de façon responsable, son rôle civique avec et pour les autres, mais c’est aussi un pilier de toutes les institutions démocratiques ainsi qu’une des meilleurs garanties de durée de la démocratie.

 

Voilà pourquoi il nous faut rendre notre foi visible dans notre engagement spirituel, politique et social.

 

Rendre ma Foi visible dans mon engagement spirituel.

 

Lors de la célébration du centenaire de notre Eglise, nous sommes réjouis d’entendre que la Côte d’ivoire, terre d’accueil, pourrait être une nouvelle patrie pour Jésus-Christ. Ce n’est qu’un vœu que nous devons réaliser les uns et les autres en nous engageant davantage à faire la part plus belle à Dieu, dans notre vie individuelle et nationale. Je m’adresse à chacun d’entre vous, jeunes, enfants, hommes et femmes, pour que chacun intègre davantage le spirituel dans son vécu quotidien. Ce n’est pas tout d’appartenir à une confession religieuse. Si je demandais : que tous ceux qui sont baptisés lèvent la main, nous aurions tout de suite dans cette assistance, une forêt de mains levées. Mais de tous ces baptisés, combien y a-t-il de chrétiens, c'est-à-dire combien sont-ils ceux qui portent la vraie soif de Jésus-Christ jusqu’au fond de leur cœur et en imprègnent leurs actes de tous les jours.

 

Quelle serait notre réponse si le Christ lui-même apparaissait ce matin et, les yeux dans les yeux, nous posait cette question fondamentale autrefois adressé aux Apôtres : « Pour vous, qui suis-je ? » pour vous qui suis-je dans votre vie personnelle, familiale, professionnelle, sociopolitique ? Chacun doit se demander si la foi reçue au baptême avec tant d’enthousiasme au début, n’est pas aujourd’hui rangée dans les tiroirs comme un vieux diplôme. Est-ce que l’évangile est lu régulièrement, seul, en famille ou dans les groupes d’actions pour servir de référence aux paroles et aux actes que nous posons ? Sommes-nous vraiment convertis, c'est-à-dire avons-nous évacués de notre vie les vielles peurs traditionnelles et modernes ?

 

 Mes frères nous ne constituerons jamais une communauté cohérente, nous ne ferons jamais un pays cohérent et fort si, nous ne cherchons pas à entretenir une forte spiritualité dans notre existence. Trouvons le temps d’une méditation profonde tous les jours. Vivant dans une civilisation dite de bruits, nous sommes facilement noyés, et risquons d’être superficiels, insignifiants. Il nous faut forcement émerger et nous ménager des plages de silence ,de prière et de réflexion pour pouvoir sentir autre chose que le matériel pur qui est en fin de compte déprimant.

 

Cherchez à vous informer concernant votre religion qui est d’abord une adhésion totale à Jésus, une conversion du cœur et une volonté ferme de chercher à faire l’expérience de la présence de Dieu en vous. Que votre foi ne soit pas quelque chose de cérébral, de purement intellectuel, mais qu’elle descende dans votre cœur. Et demandez au Seigneur d’ouvrir les oreilles et les yeux de votre cœur pour percevoir ce que l’Esprit dit à l’Eglise de Côte d’Ivoire et ce qu’il dit à vous militants de son royaume.

 

L’Eglise, pour vous, la paroisse, territoire canonique qui rassemble les croyants catholiques, représente-t-elle pour vous une invitation constante à vous engager dans les œuvres et les mouvements qui sollicitent vos énergies? Dans vos paroisses ne vous contentez-vous pas d’être des chrétiens du dimanche qui comme un feu follet, se montrent et disparaissent. Votre vie de chrétien catholique doit être soutenue par la fréquentation de deux grands sacrements de l’Eglise : L’Eucharistie et le sacrement de la réconciliation. Retenez que l’Eglise entière naît de l’Eucharistie qui a trois dimensions : sacrifice unique, nourriture du pèlerin que nous sommes chacun et présence amicale qui invite constamment à une visite priante, adorante. Soyez des familiers de l’Eucharistie.

 

Retenez aussi que le sacrement de la réconciliation vous invite au geste naturel de la purification. L’humble aveu de nos péchés nous rapproche de Dieu et des autres et nous pousse vers les sommets de la sainteté. Nous sommes tous appelés à la sainteté. Et je prie le Seigneur pour que notre Eglise ivoirienne devienne, par notre recherche de conversion quotidienne, une officine à faire des saints et des saintes.

 

Engagés dans votre Eglise, instruits et capables de la défendre, vous vous forgerez une âme de dévoué, une âme de gagneur pour les problèmes de la société contemporaine. Dans la cité des hommes, vous ne pouvez pas être des suiveurs mais des éléments positifs du changement.

 

Rendre ma foi visible dans ma vie de tous les jours.

 

« Il ne suffit pas de me dire Seigneur, Seigneur pour entrer dans le royaume des cieux ; il faut faire la volonté de mon père qui est aux cieux. » Mt 7,21.

Or la volonté de Dieu frères et sœurs, c’est que ses fils vivent unis dans la paix. Ainsi dans le contexte de notre terre ivoirienne secouée par le vent des injustices, gangrénée par la cupidité engendrant la corruption, menacée de l’ethnocentrisme,  les communautés chrétiennes ne peuvent plus se contenter de prier : il faut prier et faire suivre notre prière d’actes qui témoignent positivement de notre être chrétien Chacun dans son lieu de vie et d’action.

 

Je voudrais ici m’adresser à toutes les couches de la société. L’essentiel de cette partie ressort du document de la conférence épiscopale des évêques de Côte d’Ivoire produit à leur rencontre du 13 juin 1999. Je vous invite encore à lire et à méditer seuls ou en groupe ce document qui est d’une importance capitale.

 

Aux hommes politiques

 

Les chrétiens n’ont pas de systèmes politiques à proposer. Habités et mues par l’Esprit  créateur, régénérateur de Dieu, ils sont établis, immergés dans le monde pour y être le sel et la lumière du monde. Ils incarnent et inaugurent dans le quotidien la dimension historique du message de solidarité et de libération proclamé par Jésus Christ.

 

Les chrétiens s’engagent dans la politique pour exprimer et inscrire dans l’histoire le parti pris de Dieu pour l’homme et pour tout l’homme. Alors que les chefs des nations dominent sur les peuples, le Christ, lui, est venu pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude. A sa suite et à son exemple, les chrétiens doivent s’engager, s’investir à fond de manière ouverte, critique et prophétique dans la construction quotidienne de la cité qui devient ainsi annonce, usage du monde à venir. Le chrétien qui s’engage en politique doit se poser la question suivante : si j’ai le pouvoir, est-ce que ce sera pour servir uniquement mes intérêts et les intérêts de mon groupe ? Dans l’Evangile, Jésus dit que le pouvoir égal service. Suis-je convaincu ? 

 

La Côte d’Ivoire dans sa marche vers la maturité politique accède à une étape décisive, celle de sa construction par la participation plus effective et plus accrue de tous ses enfants et habitants, et en premier lieu celle des hommes et des femmes responsables politiques que vous êtes. Quand vous le pouvez, pour le bonheur de tous, engagez-vous dans la politique pour servir sérieusement, d’une façon désintéressée, toutes les couches sociales, en évitant le piège du mensonge érigé en système de vie et de commandement. Faites correspondre votre engagement civil à votre témoignage pour la justice et la solidarité. En vous engageant, sachez que cela implique deux attitudes fondamentales :

 

  • Le respect de toutes les forces sociales et l’ouverture à la collaboration franche avec tous les citoyens vos frères et compatriotes quelle que soit leur appartenance idéologique, politique, religieuse et ethnique. Votre souci majeur devra être la recherche de la défense des intérêts du peuple tout entier dont vous avez la charge et non la recherche de vos intérêts et de ceux de votre parti.

 

  • En régime démocratique, le parti au pouvoir et les partis d’oppositions sont  nécessaires, complémentaires et interdépendants pour la marche et la gestion équilibrée de notre pays. L’alternance politique demeure toujours possible si telle est la volonté des électeurs. Elle permet aux électeurs de prendre conscience du fait que les gouvernants sont responsables devant eux et investis par eux .Rappelez-vous aussi que la confrontation au grand jour des idées et des intérêts constitue une des caractéristiques fondamentales de la vie politique démocratique. Et cette confrontation suppose l’opposition dont la place et le rôle sont nécessaires et déterminants pour la marche de notre pays. C’est pourquoi être dans l’opposition ne signifie nullement être systématiquement contre ceux qui sont au pouvoir, contre ce qu’ils réalisent de bien et de positif dans l’intérêt général de la nation. Certes, chaque parti politique lutte pour la prise et l’exercice du pouvoir. Cela est légitime. Mais cette lutte doit être juste et pacifique :

 

Juste, c'est-à-dire qu’elle doit être conforme aux règles du véritable jeu démocratique ;

 

Pacifique, c'est-à-dire sans violence institutionnelle, verbale et physique ; bref une lutte qui s’inspire finalement de la règle d’or de l’Ecriture : « ce que tu n’aimes pas, ne le fais à personne » (Tb 4,15 ; Mt 7,12 ; Lc 6,31)

 

Les jours que nous vivons sont d’une importance capitale. Voilà pourquoi je vous invite encore une fois à prendre conscience des implications de votre foi dans la vie de tous les jours, surtout au niveau social, politique. Ainsi, vous manifesterez, dans la lumière de votre foi, votre appartenance effective à ce pays qui fera de vous des citoyens à part entière. Vous serez des hommes et des femmes responsables, conscients de leurs droits et devoirs. Vous montrerez que vous aimez votre pays, en adoptant à son égard un patriotisme équilibré et en vous engageant pleinement dans la vie économique, politique, culturelle, religieuse et écologique. Cela exige qu’il faille comme le disait le pape Jean Paul II de vénéré mémoire :

 

-« Concilier les différences extrêmes et dépasser les animosités ethniques »

- Adopter des politiques appropriées aptes à améliorer la croissance et les investissements afin de créer des emplois ;

-protéger le patrimoine commun contre toutes les formes de gaspillage et de détournement réalisés par des citoyens dépourvus de sens civique et des étrangers sans scrupule.

 

Aux fonctionnaires

 

La première forme de témoignage est la vie même du chrétien qui rend visible un nouveau mode de vie.

 

 Chers frères et sœurs vous constituez aujourd’hui les cadres sur lesquels s’appuie le fonctionnement vital de notre nation. Le pays entier ne sera jamais assez reconnaissant envers vous qui êtes les artisans au quotidien de la dignité par le travail que vous accomplissez au jour le jour avec abnégation et honnêteté. Cependant il ne manque pas dans vos rangs, des personnes indélicates gagnées par la corruption. Comment pouvons-nous valablement prétendre faire reculer les frontières de la pauvreté et de la misère si nous érigeons la corruption en système officiel.

Comment voulez vous par exemple que des investisseurs étrangers fassent confiance pour oser prendre chez nous le risque d’initiatives libératrices des pauvres si, au lieu de promouvoir la transparence et le culte du travail bien fait, à tous les niveaux, dans les bureaux et autres instances, il doivent faire face aux règles préétablis du racket, aux pots de vin ? Il n’est pas normal non plus que des étrangers chez nous, au nom de l’hospitalité ivoirienne, fassent de la corruption et de la fraude une condition sine qua non pour réussir dans le monde des affaires. Je souhaite vivement que le témoignage que le témoignage et l’exemple des fonctionnaires accueillants, respectueux, désintéressés, honnêtes, justes et efficaces entrainent beaucoup d’autres à leur suite.

 

Alors notre fonction publique sera réellement animée par des hommes et des femmes toujours soucieux et fiers de rendre service à toute personne humaine quelque soit son rang, sachant dire Oui quand c’est Oui, non quand c’est Non.

 

Aux chefs traditionnels

 

Biens chers chefs traditionnels, vous détenez une partie très importante de la mémoire de notre peuple. Vous êtes porteurs et gardiens des valeurs ancestrales de notre pays. C’est à ce titre que vous avez une place et un rôle de choix à jouer dans la gestion des hommes et des femmes de notre temps qui placent encore en vous leur confiance. Eu égard à l’importance de votre mission au sein de votre peuple, en ville comme au village, veillez à vous défaire du rôle folklorique et touristique dans lequel on risque de vous enfermer. Gardiens de nos valeurs traditionnelles, faites entendre la vraie voix de notre mère Afrique : voix faite de sagesse, de respect de l’homme et de la vie.

 

Face à la tentation de l’argent, face à la corruption et à la manipulation, restez vigilants et tenez bon pour savoir discerner les vrais intérêts de ceux dont vous avez la charge. Ainsi, vous éviterez la banalisation de nos traditions et le cautionnement de certaines pratiques politiciennes qui ne visent pas le bien de la nation mais, au contraire, ternissent votre personnalité et la mémoire des ancêtres que vous représentez parmi nous.                                                                

 

Aux hommes et femmes de loi

 

 Pour vous les parlementaires, le peuple vous a choisis pour le représenter, parler et agir en son nom. Il vous fait confiance à cause de vos qualités de loyauté, d’honnêteté, de rigueur et de désintéressement. Vous êtes donc chargés d’une noble mission. Nous reconnaissons tout votre dévouement pour ce que vous faites. Une loi, pour qu’elle soit loi, doit tenir compte des aspirations légitimes du peuple. C’est pourquoi, vous avez la lourde tâche d’élaborer, de voter des lois justes pour le bien du peuple et non pour les intérêts particuliers.

 

Vous les magistrats, vous avez la mission vitale de faire respecter la loi pour le bien être de toute la nation. Je profite de l’occasion pour féliciter, encourager, soutenir tous ceux et toutes celles qui, parmi vous, avec fermeté résistent à la corruption par respect de cette loi, et ainsi contribuent à l’édification d’un état de droit où tous les citoyens sont traités de manière égale face à la justice.

 

On observe souvent dans notre pays tant d’injustices et d’entorses à la loi (intimidation, non aboutissement des procédures judiciaires, corruption…) qui démobilisent et découragent le citoyen de bonne volonté, tuent en lui le civisme et le patriotisme. Les hommes de lois que vous êtes, avez, plus que d’autres la tâche d’aider notre pays à se guérir de ces plaies sociales. Parce que vous êtes des hommes de loi, vous êtes la conscience de notre peuple. C’est pourquoi, je vous invite avec empressement à combattre cette corruption qui n’honore personne, ni votre corporation, ni le pays qui compte sur vous.

 

Adresse aux agents chargés de l’ordre public

 

Un pays de paix est un pays où les habitants et les visiteurs peuvent vivre et circuler librement et en toute sécurité sans crainte pour leur vie et leurs biens. Depuis l’indépendance de la Côte d’Ivoire, vous assurez cette tâche difficile de protection de la population et des frontières avec beaucoup d’abnégation, de courage et même d’héroïsme, malgré les moyens limités mis à   votre disposition. Toute la population ivoirienne vous en sait gré.

 

Cependant, pour le bien suprême de notre pays et pour la sauvegarde de l’honneur et de la crédibilité du corps auquel vous appartenez, je me permets de relever certaines choses : nous constatons avec bonheur le sérieux avec lequel certains membres des corps habillés veillent à la sécurité des personnes et des biens sur les routes du pays. Nous saluons, par la même occasion les efforts de ceux et celles qui se consacrent de façon gratuite à leur travail, nous ne saurions aussi passer sous silence l’endurance de ceux qui portent le poids des intempéries sur nos routes. Nous souhaitons vivement que tous ces bons exemples soient suivis par tous. Permettez-moi cependant de rappeler le comportant peu courtois et mercantiles de nombres de nos frères sur les routes du pays, à l’égard des transporteurs, des commerçants, de simples passagers et usagers.

 

Ainsi, pour quelques pièces ou pour un billet de banque, ils laissent circuler des véhicules techniquement défaillants qui constituent de véritables dangers de mort pour le passager… tous ces comportements et bien d’autres encore laissent croire que vous êtes au service de vos intérêts particuliers et non au service du pays et de ceux qui l’habitent. Nous vous invitons à redorer le blason de votre corporation par un changement de mentalité et de comportement. C’est de cette manière que vous témoignerez de  l’amour que vous nourrissez pour notre pays.

 

Adresse aux hommes et femmes de média

 

Le monde moderne dans lequel nous sommes est un monde de communication. Votre rôle, vous le savez, est d’informer, de former, d’éduquer et de distraire d’une manière saine et responsable. Vous êtes des guides et des éveilleurs de conscience pour la population.

 

Je saisis l’occasion pour féliciter, ceux qui, avec courage, se force d’informer, avec objectivité, vérité et respect des personnes. Au nom de l’esprit civique, pour l’amour de votre métier et pour l’honneur de notre pays, je vous exhorte à éviter le journalisme alimentaire, le journalisme de délation ou de règlement de compte, et à ne pas étaler l’intimité des citoyens à travers vos écrits et productions audiovisuels. Le rôle principal du journalisme est de relater les faits avec objectivité pour permettre d’éclairer les débats. C’est cette tâche noble que je vous invite à assumer avec honneur, esprit civique et patriotisme équilibré.

 

Adresse aux jeunes

 

Chers jeunes, vous représentez le printemps de la vie. Le jeune, dans la famille, dans la société, dans un pays, assure la continuité. Il est le garant des valeurs physiques, intellectuelles, morales et spirituelles qui constituent le patrimoine d’un peuple.

 

A chacun d’entre vous, Jésus demande : pour vous qui suis-je ? Par la parole, par la vie, par le progrès de votre vie spirituelle, montrez que Jésus-Christ est présent en vous et que par vous il veut être connu, il veut être vécu par les hommes d’aujourd’hui. Il faut parler à temps et à contre temps de Jésus-Christ. Vos camarades des sectes le font. Parfois, ils vous agacent. Mais parfois, ils suscitent votre admiration parce qu’eux au moins, osent dire ce qu’ils croient. Et vous, de quoi auriez-vous peur.

 

Prenez conscience que vous devez être des prophètes c'est-à-dire des témoins de l’amour brûlant qui sort de la jeunesse d’aujourd’hui, cet amour que le Christ nous a donné à profusion. Comment allez-vous vous y prendre pour participer au maximum à cette action d’annonce et de témoignage que l’Eglise commande. Aujourd’hui, Dieu vous interroge chacun et tous à la fois : Comment structurez-vous votre vie pour que votre entourage bénéficie au maximum de votre passage sur terre ? Jésus nous a donné l’exemple d’une jeunesse forte à Nazareth. Il a vécu la vie laborieuse et exigeante des jeunes de son âge, mais il a tranché par le message qu’il véhiculait tous les jours, message de communication  et surtout messages de haute et profonde spiritualité.

 

Cherchez à vous informer concernant votre religion qui est d’abord une adhésion totale à Jésus, une conversion du cœur et une volonté ferme de chercher à faire l’expérience de la présence de Dieu en vous. Demandez au Seigneur d’ouvrir les oreilles et les yeux de votre cœur pour percevoir ce que l’Esprit dit à l’Eglise de Côte d’Ivoire et ce qu’il dit à vous jeunes, qui êtes militants de son royaume. Chers amis, osez vous démarquer des autres, n’ayez pas honte d’avoir un comportement qui tranche avec celui de vos camarades qui n’ont pas encore rencontré le Christ. Chers jeunes, soyez contagieux !

 

Aux guides religieux.   

 

C'est avec foi et amour que nous, guides religieux, avons répondu oui à Dieu qui nous a appelés à le faire connaître, à le faire aimer et à le servir à travers nos frères et sœurs. Éveilleurs de la foi et de la conscience, signes de la présence physique de Dieu dans un monde troublé mais assoiffé de spirituel, fragiles mais indispensables, nous portons en nous l'espérance de tout un peuple : ne le décevons pas ! Sachons nous mettre au-dessus des débats politiques pour apporter, dans la vérité, la lumière nécessaire qui permettra au pays de s'engager dans une voie juste pour son développement et le bonheur de tous les citoyens.

 

A ce titre, nous devons prendre toute la part qui est la nôtre dans l'œuvre de réconciliation nationale, en refusant toute implication personnelle dans les querelles politiques au détriment du bien commun. Amenons nos fidèles à comprendre que tous les citoyens forment une famille : une famille avec différents groupes linguistiques; une famille avec diverses sensibilités religieuses; une famille avec différents partis politiques ; et travaillons ainsi à les sensibiliser à la culture de la paix, de la tolérance et de la fraternité. Prions pour la conversion des cœurs des Ivoiriens et de tous ceux qui habitent la Côte D'Ivoire.

 

Conclusion

 

Chers Frères et sœurs,

 

« On n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau » que la lampe de votre foi brille de mille feux.

 

Je prie articulément pour vous afin que votre foi soit forte et quelle ne défaille pas. Je prie afin que vous trouviez toujours en vous et en vos pasteurs que nous sommes les forces pour protéger la flamme de votre foi.

 

Je prie pour que vous constituiez des familles fortes : avec vos parents et vos enfants, avec vos communautés ecclésiales de bases, avec vos communautés paroissiales… afin que par vous, l’Eglise qui est à Abidjan soit forte elle aussi.

 

Je prie afin que votre foi, soit visible et qu’elle vous aide à faire les bons choix dans toutes les circonstances de votre vie. Puisse le Saint Esprit vous soutenir dans votre foi.

 

Amen !

 

+ Jean Pierre Cardinal KUTWÃ

Archevêque Métropolitain d’Abidjan

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